Le perron est une institution majeure à la Nouvelle Orléans, un haut-lieu de la vie sociale. Comme dans le reste du Sud, le porche est omniprésent ici, ouvert sur la route certes, mais intime, souvent un peu retranché, coupé du trottoir par une barrière, un grillage ou un lopin de verdure. Un lieu d'où on vous regarde passer c'est sûr, d'où on vous dit bonjour quand on ne vous invite pas à vous arrêter pour une causette.
Le perron, lui, parce qu'il tombe littéralement sur le trottoir, appartient un peu à tout le monde. L'ami qui m'a sous-louée la petite maison que j'occupe dans le Bywater, près du Canal Industriel, m'avait prévenue. "Ne t'inquiète pas si tu vois des gens assis sur l'escalier". Et en effet, régulièrement (et aussi parce que j'habite en face d'un des rades les plus réputés du quartier pour sa faune hétéroclite d'artistes, de personnages singuliers et de buveurs invétérés), mon perron est occupé.
J'y ai rencontré Otis, l'homme à tout faire du quartier. Il n'y vient que depuis Katrina. Pre-K, il habitait de l'autre côté du Canal, dans le Lower 9th, aujourd'hui encore partiellement en ruines. Alors, Otis traîne de ce côté, qu'il ne connaissait pas avant, m'a-t-il dit, et accessoirement sur mon perron. On le dit sans abri, il est discret sur le sujet. Il se déplace à bicyclette.
Il vit de petits boulots dans le quartier. L'autre jour, il m'a proposé de laver ma voiture, quelques jours plutôt, un ami l'a engagé pour un déménagement. Il y aussi cette femme sans âge, déformée par l'alcool et la vie, maquillée outrageusement, qui me raconte régulièrement des histoires que j'ai de la peine à comprendre. Elle fait toujours mine de s'esquiver quand j'arrive, mais je sais qu'au fond, elle espère surtout une conversation.
Dimanche dernier, vers dix heures du matin, j'entends une certaine animation. C'est le perron du voisin, cette fois, qui est assiégé. Ils sont six ou sept, la retraite bien avancée à en juger par les cannes appuyées au mur et les sillons profonds de leurs visages. Ca sent très fort la marijeanne et ils tiennent tous un verre à la main. Un homme jure qu'à part, éventuellement, Tampa, et encore, il n'y a qu'un endroit au monde où il s'imagine vivre, la Nouvelle Orléans. "Je ne suis jamais allée à Tampa", répond une femme. L'homme: "Bah, laisse tomber, ça ne vaut de toutes façons pas la Nouvelle Orléans". Le bar d'en face ne ferme que quelques heures par jour, entre la fin de la nuit (c'est aléatoire) et 8 heures de matin.
I learned pretty early on the importance of the stoop in New Orleans. It's not exactly like a porch, a more retreated place, even if open on the front of the house. The stoop, litterally, falls on the sidewalk, therefore it's everybody's stoop. And you soon notice that everybody, indeed, feels comfortable on your stoop.
When i subletted this place in the Bywater area, my friend warned me:"People tend so sit here, be cool about it". That's how i met Otis. Pre-K, he used to live in the Lower 9th, on the other side of the Industrial Canal. These days, he hangs out on this side, which did not flood. Otis is said to be homeless, his house flooded, but it doesn't like to talk about it. People in the neighborhood offer him work around their house, that's how he makes his living. I also met this ageless women, battered by life and alcohol. She always stands when i arrive, but i know there is nothing more she wants than a small talk.
Last Sunday, at a very early hour. I heard a animated conversation. This time around, my neighbor's stoop was besieged, by six or seven elderly people. Strong smell of marijuana hanging in the air. They all hold a glass in their hand. A man was arguing about the quality of life in New Orleans. "Maybe, maybe Tampa, and even". "I have never been to Tampa", said a woman. The Man. "Well, just forget about it, nothing compares to New Orleans anyway". I forgot to say, i live across the street from one of the most popular dives in the neighborhood. You never really know when it closes, but it always opens at 8am, even on Sundays.
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