Quant le Michigan
et la Floride avaient défié les partis nationaux l’an dernier en décidant d’avancer
leurs primaires au 15 et au 29 janvier respectivement, le parti national
démocrate avait été clair : les délégués ne compteraient pas et il priait les candidats
de ne pas faire campagne dans ces territoires rebelles. A l’issue des
scrutins pourtant, Hillary Clinton a demandé à ce que les règles soient
revues : « Notre nominé aura besoin du soutien enthousiaste des
démocrates de ces états et je demanderai à mes délégués de participer à la
convention de Denver».
Guère étonnant, Mme Clinton est arrivée en tête dans les
deux états. Si elle prend le risque de se mettre une nouvelle fois à dos son
rival Barack Obama, la raison en est simple: la guerre aux délégués sera sans
merci. Et la victoire ne pourrait tenir qu’à une poignée d’entre eux.
D’abord les électeurs ne votent pas directement pour le
candidat de leur choix mais pour un délégué qui les représentera à la
Convention. Ces délégués doivent annoncer la couleur, déclarer pour qui ils
voteront et devront s’y tenir. Côté républicain, la situation est relativement
plus aisée même si elle n’est pas un modèle de démocratie. Le gagnant du vote populaire dans 11 états empoche tous
les délégués de cet état. Dans certains états le décompte se fait par
district, le gagnant emportant les délégués de ce district, une forme indirecte de proportionnelle - si ce concept est possible - qui permettra un partage des délégués dans ces états.
Côté démocrate,
la situation est plus complexe. En apparence, les délégués sont attribués à la
proportionnelle, au niveau des états. Mais le semblant de démocratie s’arrête
là. A l’intérieur de chaque état, les circonscriptions électorales sont libres
d’appliquer la règle du « winner take-all » (le gagnant rafle la
mise) ou la proportionnelle. Sans compter que certains districts - par souci d'égalité de traitement pour régions rurales moins peuplées ont un nombre de délégués supérieur par tête de pipe aux grandes régions urbaines (je vous rappelle le Nevada). En bref, les pronostics sur la base des sondages sont quasiment impossible.
photo by Zen CC
Les superdelegates semblent en effet beaucoup plus favorables à Hillary qu'à Obama.
On peut voir facilement la différence sur le site de cnn :
Ici pour voir les résultats des votes "populaires" :
http://edition.cnn.com/ELECTION/2008/
Ici pour les totaux en prenant en compte les estimations des votes des superdelegates :
http://edition.cnn.com/ELECTION/2008/primaries/results/scorecard/#D
Chez les démocrates, la seule chance pour Obama de passer est donc de gagner clairement plus de délégués dans les états car il n'a pas assez de supports dans l'establishement démocrates.
S'ils sont au coude à coude, c'est Hillary qui sera désignée.
Voilà un exemple édifiant de la doctrine des pouvoirs et des contre-pouvoirs (volontée populaire / institutions) telle qu'elle est aujourd'hui comprise aux USA.
Rédigé par : Arthur | 03/02/2008 à 17:17
@ arthur
je ne sais pas si c'est une nouvelle définition mais la théorie des contre-pouvoirs est définie comme la relation (check of balances) entre l'exécutif, le législatif et le judiciaire. Cela n'a rien à voir avec des processus de désignation à l'intérieur de partis.
1) le rapport entre la volonté populaire et les institutions est réglé par les modes de scrutin (proportionelle, référendums, type de régime (parlementaire/présidentiel), nombre de tours etc...) lors de l'élection proprement dite. Mais les représentants des partis sont élus suivant les modes choisis par les militants. On ne peut pas dire que Sarkozy et Ségolène ont été élus comme leaders de leur partis par "volonté populaire".
2) les modes d'élection de candidats présidentiels aux USA sont que je sache uniques. Ils passent par des votes non secrets (caucus) avec (très) peu de légitimité démocratique à des votes secrets. De plus les électeurs d'autres tendances y sont permis à y participer, ce qui donne des effets plutôt pervers. Imaginons qu'en France qu'à l'intérieur de l'UMP sarkozy et Villepin soient candidats mais que le jour de leur élection des militants UDF et PS soient habilités à voter en remplissant un simple formulaire ! Et la même chose au PS....
3) le système US est archaïque. Il avait certainement de la valeur il y a deux cents ans, mais ne correspond plus aux conceptions modernes de la démocratie. Ted Rall a d'ailleurs écrit un article très intéressant à ce sujet. Il a démontré que le candidat favori de la blogosphère (en gros toute la frange progressiste non-instutionalisée des Démocrates, en gros "la base"), c'est à dire Edwards, n'avait aucune chance car elle a été coulée systèmatiquement par les indépendants.
donc, ne nous mélangeons pas les pinceaux : le prochain POTUS sera peut-être Mc Cain, élu par "volonté populaire" en dépit des désirs des militants démocrates concernant Obama ou un(e) autre.
D'ailleurs Obama est la bête noire (no pun intended) des Israéliens par la suite de ses déclarations concernant l'Iran et la Syrie. Donc il y a une possibilité que Bloomberg, un indépendant soutenu par l'AIPAC, se lance dans la compétition et "fausse" complètement la donne (sérieusement discuté dans Huffington Post et TPM).
Donc qu'est que la "séparation des pouvoirs" a à voir là dedans ? Sinon qu'en règle générale les élections sont libres dans une démocratie. Mais ça ne nous avance pas beaucoup...
Mais peut être est ce que tu te réfères à Deleuze (http://en.wikipedia.org/wiki/Power_%28sociology%29) mais là on est dans des théories sociologiques.
Rédigé par : | 04/02/2008 à 05:32
Merci pour cette explication complète quoi que subjective : "le système US est archaïque".
En fait je parlais bien de la perception que certain "Etat Uniens" ont de leur propre système du "check of balances" à l'heure actuelle.
Je base cela sur une discussion que j'ai eu avec plusieurs d'entres eux.
Il leir paraît naturel et même souhaitable que tout pouvoir est son contre pouvoir : même le pouvoir de la majorité ne doit pas s'imposer à la minorité (et cela même si la minorité fini par empècher les évolutions).
Néanmoins je ne me permettrai pas de critiquer ce système que je ne comprends pas bien, car ces personnes (très intelligentes du reste), ont la perception que leur système marche parfaitement puisque notamment il n'a pas nécessité d'évolution majeure depuis 200 ans...
Ce n'est pas forcément mon avis, mais c'est intéressant à savoir.
Rédigé par : Arthur | 04/02/2008 à 08:02
je trouverais ça écoeurant qu'on prenne en compte Michigan et la Floride!!
Rédigé par : Ghebim | 04/02/2008 à 11:08