La barre était placée si bas pour Sarah Palin ce soir dans son débat contre Joe Biden, qu'il n'est pas difficile d'admettre qu'elle a non seulement limité les dégats, mais qu'elle a sans doute mis un terme aux propos dévasteurs après ses interviews calamiteuses des derniers jours. De là à dire que la colistière de John McCain a excellé, il y a un pas que je ne franchirai pas. Sarah Palin a esquivé toutes les questions difficiles, en particulier celles ayant trait à l'économie, qui est le sujet sur lequel le ticket républicain a de sérieuses difficultés à convaincre alors qu'il sagit de la préoccupation majeure Américains.
En répétant à plusieurs reprises les mêmes phrases, souvent hors propos, notamment sur la politique énergétique et l'imposition fiscale, Sarah Palin a montré qu'elle avait bien appris les leçons serinées par ses coaches. Mais elle semble incapable de présenter une position personnelle sur les dossiers les plus importants, à l'exception des forages pétroliers (drill, baby drill). Comme le dit Bill Schneider de CNN, "elle ne manque certainement pas de confiance en elle, elle manque de cohérence".
Sa performance aura certainement rassuré ses supporters de la base conservatrice, un bon point pour McCain qui n'a jamais été en odeur de sainteté auprès des électeurs de la droite religieuse. Je doute cependant qu'elle aura apporté des voix nouvelles au ticket républicain, en particulier auprès des indépendants. Ce sera donc bien à John McCain lui-même de récupérer les voix de cette tranche de l'électorat qui semble filer vers Barack Obama depuis leur premier débat, vendredi dernier, et surtout depuis la crise financière qui secoue le pays.
Joe Biden, pour sa part, a réussi une bonne performance. Comme Sarah Palin, il a été meilleur que prévu. Pour un homme de sa trempe, cela veut dire qu'il a été très bon. Clair, précis, répondant aux questions effectivement posées. Il a évité les gaffes. Il est surtout parvenu à ne pas paraître condescendant ou méprisant face à une rivale clairement moins compétente que lui sur à peu près tous les dossiers.
Il n'a jamais remis en cause les positions de la gouverneure de l'Alaska mais a dirigé toutes ses attaques contre John McCain. Sarah Palin a du reste fait de même, vantant les mérites du sénateur de l'Arizona et dénonçant les positions de Barack Obama. Sur ce point, les deux ont fait le travail qui était attendu d'eux, défendre leur candidat et tenter de démolir leur adversaire. C'est leur rôle, ils l'ont tenu.
Un sondage CNN montrait que 51% des Américains pensent que Joe Biden a gagné ce débat contre 36% pensant la même chose de Sarah Palin. Plus important, un sondage CBS auprès d'électeurs indécis - au risque de me répéter mais ce sont eux qui comptent à ce stade de la cmapagne - montrait que 46% d'entre eux pensent que Biden a gagné contre seulement 21% pensant la même chose de Palin. En conclusion, Sarah Palin n'a pas cassé les derniers céramiques sur l'étagère, évitant ainsi d'abreuver les chaînes d'infos en continu de nouvelles images désastreuses. McCain peut respirer et espérer recentrer sa campagne qui a cruellement manqué de discipline ces derniers jours.
(Ma déception ce soir aura été pour l'animatrice du débat, Gwen Ifill de PBS, dont je respecte par ailleurs le travail. Elle aurait à mon sens dû intervenir pour forcer Sarah Palin à répondre aux questions posées. Mais sans doute a-t-elle fait preuve de retenue pour ne pas paraître biaisée, alors que les conservateurs avaient lancé depuis deux jours une fronde contre elle. Ils affirmaient qu'elle ne serait pas à même de faire preuve d'équité car auteure d'un livre à paraître sur la polique et les questions raciales à l'époque d'Obama. Curieusement, leurs attaques sont intervenues au moment où la crédibilité de Sarah Palin sombrait, alors que l'annonce de la publication du livre de Gwen Ifill est connue depuis le mois de juillet déjà. Dommage).